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Exposition L’Art en Broderie { Musée de Cluny }

Exposition L’Art en Broderie { Musée de Cluny }

Quelles chanceuses, ces Croqueuses, invitées dans les musées à de passionnantes visites privées ! Après deux superbes expositions chez Picasso, nous voilà cette fois propulsées dans le passé, au pays des merveilles brodées…

RETOUR À CLUNY

Oh, pas le Cluny de Saône-et-Loire – nous restons à Paris ! – mais celui du Quartier Latin, de la Sorbonne et des Thermes Antiques. D’ailleurs, pourquoi le Musée du Moyen-Âge porte-t-il ce nom ? Tout simplement parce que le bel hôtel particulier qu’il occupe, construit au XIIIème siècle, abritait autrefois les abbés de l’ordre de Cluny qui enseignaient à l’Université. Entre eux et nous, au fil de l’histoire, le bâtiment a connu de nombreuses aventures plus ou moins douloureuses. Finalement, c’est grâce à l’un de ses locataires – Alexandre du Sommerard, conseiller à la Cour des Comptes et collectionneur passionné – que le musée verra le jour, en 1843. L’hôtel de Cluny sera classé dès 1846, suivi des thermes en 1862.

Car ce lieu dédié au Moyen-Âge a néanmoins la particularité de se tenir sur l’un des plus importants vestiges du Lutèce antique : les thermes romains. Ce que l’on en voit aujourd’hui ne représente hélas qu’une petite partie de l’ensemble, qui s’étendait alors sur plusieurs hectares. On y venait pour se laver, mais également se faire couper les cheveux, se détendre, lire – les thermes possédaient une bibliothèque – ou bavarder. Ce véritable « complexe thermal » comprenait aussi un gymnase où l’on pratiquait toutes sortes d’activités physiques. Une autre référence à l’Antiquité vous attend d’ailleurs dans le square Paul-Painlevé, juste devant l’hôtel de Cluny : une réplique de la fameuse Louve Capitoline, offerte par la ville de Rome à Paris en 1962, lors du jumelage des deux capitales. Clin d’œil amusant du destin puisque l’on sait maintenant (depuis 2012 seulement !) que cette statue prétendument étrusque (Vème siècle avant JC) date finalement du… Moyen-Âge !

Mais, puisque les époques se suivent, il n’est pas interdit de les relier entre elles – notamment par l’architecture. C’est le pari du chantier mené par Bernard Desmoulins, chargé de rénover le musée. Certes, l’hôtel médiéval est fermé. Cependant le reste des espaces, y compris les plus récents, est ouvert : cette magnifique exposition sur la broderie est l’occasion rêvée de les découvrir.

L’ART EN BRODERIE

Christine Descatoire, la commissaire d’exposition qui nous a guidées d’un trésor à l’autre explique ainsi ses choix : sortir ces pièces rarissimes des réserves du musée – où on les garde précieusement, car elles sont extrêmement fragiles – et les associer à d’autres, tout aussi précieuses, venues de collections étrangères doit servir à réévaluer la broderie comme art à part entière. Ne l’appelait-on pas, à l’époque, « la peinture à l’aiguille » ? C’est pourquoi les œuvres brodées présentées ici sont rapprochées d’autres réalisations, peintes ou gravées, qui leur sont contemporaines.

Savez-vous qu’il fallait faire huit ans d’apprentissage avant de pouvoir prétendre officiellement au statut de brodeur ? Rien d’étonnant quand on observe la finesse de chaque réalisation. D’autant que ces œuvres de soie, de velours, filées d’or ou d’argent, parfois ornées de perles… étaient toujours destinées à de puissants commanditaires – rois, clercs de haut rang, etc. Elles avaient fonction de marqueurs sociaux, de « signes extérieurs de richesse » pourrait-on dire. Et la corporation des brodeuses et brodeurs parisiens était elle-même très puissante.

Après deux premières vitrines consacrées aux différents types de points (très élaborés) ainsi qu’aux outils (ciseaux, dés, forces) et aux livres de modèles (ancêtres de nos « tutos » d’aujourd’hui), l’exposition se déroule ensuite à la fois chronologiquement et géographiquement à travers l’Europe germanique, anglaise, flamande, française et italienne. La scénographe a travaillé les blocs de présentation du blanc au pourpre en passant par un dégradé de roses, couleurs directement inspirées de celles de la voûte du frigidarium. Profitez de l’harmonie ainsi créée pour admirer les proportions exceptionnelles du lieu !

Comme d’habitude, chaque Croqueuse aura son petit « coup de cœur » qu’elle choisira de dessiner. Aurélie se passionnera pour le magnifique léopard héraldique (ne pas confondre avec le lion, toujours présenté de profil !) ornant un caparaçon (housse d’apparat pour cheval) du roi Edouard III d’Angleterre, arrivé au musée en 1922 sous forme de… chasuble. (Vive la récup’ ! Sa forme initiale lui a néanmoins été rendue en 1939.) Anne choisira de croquer une aumônière de luxe, tandis que Véronique préfèrera quelques appliques à l’effigie de saints martyrs : les visages la fascinent. « On pourrait presque les croire tirés d’albums jeunesse d’aujourd’hui » dit-elle, amusée. (Tiens, en parlant de lecture pour enfants, voici le livret-jeu de l’exposition tout spécialement conçu pour eux.)

« DIS BONJOUR À LA DAME »

Et Fabienne, dans tout ça… qu’a-t-elle choisi de dessiner ? Eh bien, même si l’aumônière aux personnages contournés de fil noir « à la manière d’une bande dessinée franco-belge » la font « totalement craquer », la coquine prendra la tangente vers les collections permanentes, passant ainsi allégrement de la broderie à la tapisserie – ne pas confondre, attention ! Que voulez-vous, c’est plus fort qu’elle. Impossible de résister à l’appel de la star ! Mais si, vous savez bien : l’œuvre incontournable, la « Joconde du Musée de Cluny »… La Dame à la Licorne, voyons !

La nouvelle muséographie est belle, réussie. On y arrive doucement, par une sorte de corridor dont les murs sont ponctués de citations et les yeux s’habituent peu à peu à l’obscurité. L’éclairage tamisé permet bien sûr d’admirer les tentures sans trop les endommager mais aussi d’oublier la foule. (Puisque c’est une star, nombreux sont ses admirateurs venus du monde entier.) Quant aux banquettes spacieuses placées au centre de la pièce, elles sont parfaites pour s’installer carnet en mains.

Il faut le dire encore : pendant que s’achève le quatrième et dernier volet des travaux de rénovation du musée, les œuvres les plus emblématiques y sont toujours visibles, avec de superbes expositions en prime. Alors, courrez-y ! D’autant qu’il y a urgence… Savez-vous que les œuvres textiles sorties des réserve pour l’occasion le sont suivant un protocole très strict ? Trois mois d’exposition pour trois ans de réserve : ne ratez pas le coche !

Enfin, si la broderie vous attire mais que vous ne l’avez jamais pratiquée, peut-être serez-vous intéressés par l’animation proposée dimanche 1er décembre. En effet, les élèves de l’école Duperré – qui ont imaginé puis réalisé les créations contemporaines inspirées des collections du musée à voir dans la dernière salle de l’exposition – vous offrent une initiation à la broderie. C’est libre, sans inscription et gratuit. Bref, aucune excuse pour ne pas se lancer ! Merci qui ? 😉

Et nous, Les Croqueuses, nous remercions chaleureusement toute l’équipe du musée pour son accueil adorable et savant, notamment Christine Descatoire et Aline Damoiseau. Gentes dames, grâce à vous, nous avons découvert de très belles choses – ce, dans une ambiance des plus sympathiques. C’est pourquoi nous avons un aussi grand plaisir à les partager par-ici : merci !

 

{ Infos Pratiques }

La nouvelle entrée du Musée de Cluny se trouve au n°28 de la rue Du Sommerard, dans le 5ème arrondissement. Métro Saint-Michel ou Cluny-La Sorbonne. Il est ouvert du mercredi au lundi, de 9h15 à 17h45. (Plus de renseignements ici.)

Un Château à Vincennes

Un Château à Vincennes

Après leur escapade à Saint-Germain-en-Laye, il semble que Les Croqueuses de Paris aient pris goût à la vie de château ! Coïncidence amusante, celui que nous allons croquer aujourd’hui est aussi en bout de ligne – mais de métro, pas de RER. Et, cette fois-ci, la visite sera plus modeste : pas de promenade sur les toits, juste une petite pause en mode lézards sur la pelouse qui longe les douves. Oh, des lézards un peu bizarres, bien sûr… avec pinceaux et crayons au bout des pattes ! 😉

Voilà donc nos Croqueuses confortablement installées sur l’épais tapis d’herbe verte entourant le château. Vu d’ici, le donjon est particulièrement impressionnant, jaillissant de derrière les larges fossés (26 mètres) et la solide muraille (1000 mètres de long) : c’est le plus haut d’Europe (52 mètres). D’abord manoir capétien, résidence royale du XIIème au XVIIème siècle, prison d’État au XVIIIème, puis caserne… tout comme celui de Saint-Germain-en-Laye, ce château est un témoin de pierre qui nous raconte l’histoire de France.

Assez vite, chacune trouve son angle : Fabienne et Aurélie craquent pour l’architecture étonnante du donjon, dodu de tours et de tourelles, tandis qu’Anne s’attaque à la Sainte-Chapelle et que Véronique lui tourne le dos pour croquer l’alignement des façades, si typiquement parisiennes, qui lui font face. Et c’est ainsi que l’après-midi se termine, tranquille et reposant, à l’ombre des platanes…

Cependant il faut l’avouer, celui-ci aurait été incomplet sans notre arrêt au Terminus Château, brasserie populaire et fièrement restée « dans son jus » quand tant d’autres autour se « boboïsent » à coup de brunch et d’ambiance lounge ! Et pourtant, quelques stars du grand écran y viennent régulièrement – nous pouvons en témoigner ! Pour notre part, nous y sommes entrées un peu par hasard et à une heure plus que tardive en vue d’un déjeuner. (Nous revenions de ce périple tropical qui avait drôlement aiguisé nos appétits !) La cuisine, toute simple et sans chichis, a rechargé nos batteries. Quant à l’accueil de Frédéric, il a été fantastique : encore un grand merci à lui !

{ Infos Pratiques }

Le Château de Vincennes se trouve au n°1 de l’avenue de Paris, à Vincennes. Métro Château de Vincennes. Vous trouverez ces horaires d’ouverture ici.

Le Terminus Château (qui est aussi un hôtel) se trouve au n°9 de l’avenue de Nogent, juste à la sortie du métro. Il est ouvert tous les jours de 6 heures à minuit trente.

Un « deux en un » à Saint-Germain !

Un « deux en un » à Saint-Germain !

Aujourd’hui, deux Croqueuses vous emmènent en banlieue, au terminus du RER A : Saint-Germain-en-Laye. Là-bas nous attend un château-musée à l’histoire étonnante, foisonnante et pourtant méconnue. À nous de vous faire découvrir tout ça!

TERMINUS TERRASSE

D’abord, un peu de géographie. Saint-Germain-en-Laye se trouve à 20 kilomètres à l’Ouest de Paris et à 15 au Nord de Versailles. Avec sa forêt domaniale de 3500 hectares, c’est la commune la plus vaste des Yvelines – troisième d’Île-de-France, après Fontainebleau et Paris. Mais ce qui fait sa spécificité tient avant tout à son relief. En effet, la ville est perchée au bord d’un plateau calcaire qui domine la Seine du haut de ses 60 à 90 mètres selon les endroits. De la « grande terrasse » du parc, œuvre de Le Nôtre, la vue sur Paris et ses alentours est imprenable – d’où l’intérêt d’édifier un château fort ici dès le XIIème siècle. Cela dit, celui que nous visitons aujourd’hui n’est plus le même: plusieurs fois pris par les Anglais, pillé ou partiellement incendié, il n’a cessé d’être rebâti, agrandi, transformé, menacé ou restauré. Un vrai feuilleton!

Maintenant, est-il possible de se percher plus haut encore que sur la «grande terrasse»? La réponse est «oui»! Véronique et Aurélie suivent Fabien, chargé de communication, sur les toits du château. Là-haut, la vue sur le parc et la ville est évidemment splendide. Et pourtant, après la visite commentée passionnante, ce n’est pas ce qui aura retenu finalement notre attention. Selon nous, le plus remarquable vu des toits, c’est bien l’architecture du château elle-même. Des balustrades, le regard plonge dans la cour intérieure. Il est happé par le rythme des façades, comme rayées de rouge, et celui des grandes cheminées. Les symboles sont partout. Chaque époque, chaque régime politique, a laissé son empreinte: F (et salamandre) de François 1er, N de Napoléon III, RF de République Française… S’il existe un château qui raconte notre histoire (mouvementée) dans sa durée, c’est bien celui de Saint-Germain-en-Laye!

VERSUS VERSAILLES

Petit test. Si l’on vous parle des rois de France et de leur cour, de Louis XIV, de ses fêtes éblouissantes et de ses favorites, des spectacles signés Molière et Lully… à quel château pensez-vous? Si ces quelques mots vous évoquent Versailles, vous avez – comme nous auparavant – tout faux. C’est ici, à Saint-Germain-en-Laye, que cela se passait. Pour résumer, le Roi-Soleil y naquit en 1638 et y régna jusqu’en 1682, date à laquelle il s’établit à Versailles.

Par ailleurs, saviez-vous qu’un château peut aussi en cacher un autre? Encore une découverte! Celui sur les toits duquel nous avons grimpé – cf la vidéo sur notre chaîne YouTube – fut longtemps appelé le «Château-Vieux» par opposition au splendide «Château-Neuf» qui fut construit à la Renaissance, en lieu et place de la fameuse terrasse, perché au-dessus de la Seine. Hélas, il ne reste plus rien (ou presque) de cette « Maison du Théâtre et de la Baignerie » commandée à l’architecte Philibert Delorme (Fontainebleau, Chenonceau…) par Henri II et Catherine de Médicis. Pourtant, imaginez son envergure! Décidément, ce lieu nous réserve bien des surprises…

BONUS MUSÉE

Car ce n’est pas tout: non content d’être un superbe condensé d’Histoire de France, le château de Saint-Germain-en-Laye abrite en son sein l’une des plus riches collections archéologiques du monde! En 1862, Napoléon III crée le «musée des Antiquités celtiques et gallo-romaines» lui choisissant le «Château-Vieux» pour écrin. La restauration du bâtiment, alors en ruine, est confiée à Eugène Millet, élève de Viollet-le-Duc. C’est le premier – mais également le seul, ce toujours aujourd’hui – musée entièrement consacré à l’archéologie du territoire national. D’où son nom actuel : Musée d’Archéologie Nationale (MAN). Et lui aussi a sa Joconde… la fameuse Dame de Brassempouy, sculptée dans l’ivoire de mammouth et vieille de 22 000 ans!

Vous l’aurez compris, en sortant du RER, vous allez plonger dans l’Histoire – et la Préhistoire! – tête la première. Mais ne vous attendez pas à trouver un château «dans son jus» ou meublé Renaissance: vous entrez avant tout dans un musée d’archéologie. Disons que, pour Les Croqueuses, passer la porte rouge du château de Saint-Germain-en-Laye, c’est un peu comme ouvrir une poupée gigogne… Ensuite, de la cour jusqu’aux toits, en passant par la chapelle et la salle de bal, s’emboîtent et se déploient des siècles de savoirs et de pratiques humaines dont l’architecture et la muséographie sont les précieux révélateurs.

C’est enrichies de ces multiples découvertes que nous adressons nos remerciements à l’équipe du musée – Fabien Durand notamment, mais également Hilaire Multon, directeur du MAN, qui nous ont l’un et l’autre si volontiers consacré quelques heures de leur temps!

PS : Et, en plus, comme vous le verrez sur nos photos, nous avions ce jour-là une invitée de marque! En effet, l’autrice et illustratrice Claudine Aubrun est venue croquer – l’une de ses activités favorites! – avec nous à Saint-Germain-en-Laye. Tiens, puisqu’il s’agit d’une spécialiste des enquêtes, nous vous laisserons découvrir tout seuls son lien avec le musée… Bon, d’accord, un indice vous attend ici! 😉

{ Infos Pratiques }

Le Domaine national (parc) est ouvert tout les jours de l’année – sauf les 25 décembre, 1er janvier et 1er mai. Les horaires varient selon les mois : octobre – février  = 8h – 17h / mars – avril = 8h – 19h30 / mai – août = 8h – 20h30 / septembre = 8h – 19h30.

Le Musée d’archéologie nationale (château) est ouvert tous les jours de 10h à 17h – sauf le mardi et les 25 décembre, 1er janvier et 1er mai. Les toits sont accessibles du 2 mai au 30 septembre, soit en visite guidée par un conférencier (les lundis, jeudis et vendredis / durée 1h / réservations la veille), soit en promenade commentée (les mercredis, samedis et dimanches / durée 30 minutes / réservations le jour même).

N’hésitez pas à vous renseigner sur les activités proposées au jour le jour par le musée avant de programmer votre visite – sur le site ou via l’application ArcheoMAN, disponible en versions Androïd ou Apple.

Un Minaret à Paris

Un Minaret à Paris

Prêts à partir au Maroc ? En Tunisie ? En passant par l’Andalousie ? (Tout cela, bien sûr, sans jamais quitter le 5ème arrondissement.) Alors, suivez Les Croqueuses de Paris à la Grande Mosquée

« Quand s’érigera, au-dessus des toits de la ville, le minaret que vous allez construire sur cette place, il ne montera vers le beau ciel nuancé de l’Île-de-France qu’une prière de plus dont les tours catholiques de Notre-Dame ne seront point jalouses. »

Extrait du discours officiel au lancement de la construction (1922)

VERT MENTHE

Pour commencer, nous avons rendez-vous à l’angle des rues Daubenton et Geoffroy-Saint-Hilaire. Avant de sortir crayons et carnets, nous allons d’abord nous asseoir dans la petite cour, juste à l’entrée du restaurant, autour d’un café ou d’un thé. À l’ouverture, il y a peu de monde. Chaises, tables et parasols attendent sagement les clients. La vitrine de pâtisseries, toutes plus appétissantes les unes que les autres, aussi. Deux des Croqueuses arrivent de Province : elles se sont levées aux aurores pour attraper un train et apprécient de débarquer dans ce havre de paix coloré, immédiatement dépaysant.

Véronique nous présente son amie Rosa Burdeos, l’artiste invitée du jour. Ancienne voisine – l’une à l’entrée A, l’autre à l’entrée C d’une petite cité de briques du 20ème – et marraine de sa fille cadette, elle est ici avant tout parce qu’elle dessine. Et grave, surtout. Des œuvres qu’elle expose régulièrement avec l’association Graver Maintenant. Elle enseigne également les Arts Plastiques à la Ville de Paris. Voilà ! Les présentations sont faites, les voyageuses reposées, les boissons bues et Abdelaziz, le garçon, nous offre son sourire pour un prochain lundi. Que demander de plus ? Les Croqueuses et leur invitée quittent le Salon de Thé pour aller croquer la Mosquée.

VERT OASIS

Construite quelques années après la fin de la Première Guerre mondiale dans un style hispano-mauresque, la Grande Mosquée de Paris semble prendre modèle sur celle de Fès, la prestigieuse et très ancienne Al Quaraouiyine… même si le minaret, haut de 33 mètres, évoque dit-on davantage la Zitouna de Tunis. Quant à la cour d’honneur et son jardin, absolument splendides, ils nous transportent en Andalousie. Les milliers de carreaux turquoises qui recouvrent le sol, dessinant les massifs, nous font croire au mirage d’un immense bassin d’eau claire. Bref, y pénétrer, c’est entrer dans une oasis. De fraîcheur, en été. De rêve de chaleur, en hiver. De verdure, dans la ville. De calme spirituel, dans l’agitation temporelle…

Vous lirez peut-être ici et là que la Grande Mosquée de Paris est la plus ancienne édifiée en France, mais c’est faux. D’ailleurs, si vous nous lisez attentivement, vous le savez déjà : la vraie première mosquée de Métropole fut construite ici, pendant la Première Guerre mondiale, près de l’hôpital militaire qui soignait les soldats blessés des troupes coloniales. Mais ne chipotons pas : la Grande Mosquée reste bien, en effet, la plus ancienne encore en activité. Si l’histoire de ce lieu remarquable – à la fois par sa beauté, sa vocation culturelle autant que religieuse et les enjeux politiques avec lesquels il compose depuis presque un siècle – vous intéresse, nous vous recommandons vivement cet article (Le Monde des Religions) et ce reportage (Arte), tous deux passionnants. À compléter éventuellement par la lecture du n°4315 de la revue L’Illustration, paru pendant la construction de l’édifice, en 1925.

VERT CROQUIS

Hélas, le temps passe… même dans une oasis ! Allez, Les Croqueuses, trêve de flânerie au « Jardin des Délices » : il est l’heure de choisir le meilleur point de vue, de s’y asseoir, de sortir ses affaires et de se lancer. Après avoir tout visité, les Croqueuses et leur invitée resteront dans la cour d’honneur. Les unes près de la porte monumentale donnant sur le patio, les autres sous les colonnes, le nez dans la glycine… Quel parfum délicat, quelles conditions idéales pour dessiner !

D’ailleurs, nous ne nous en lassons pas ! Véronique y est retournée la semaine dernière accompagnée d’une stagiaire débutante, qui souhaitait une journée entière d’initiation au carnet de voyage. Si dessiner sur place en bénéficiant des conseils de l’une d’entre nous vous intéresse, restez connectés : Aurélie vous a négocié quelque chose de plutôt sympathique… @ suivre 😉

{ Infos Pratiques }

La Grande Mosquée de Paris se situe au n°2 bis de la place du Puits-de-l’Ermite, Paris 5ème. Métro Place Monge. Elle est ouverte aux visiteurs (3€ l’entrée, 2 à partir de 10 personnes) tous les jours sauf le vendredi de 9h00 à 12h00 et de 14h00 à 19h00 (l’été) / 18h00 (l’hiver). Renseignements au 01 45 35 78 17.

Une chapelle sur la Seine

Une chapelle sur la Seine

Cette fois, ça y est, le (vrai) printemps est là et Les Croqueuses se sont retrouvées, toutes les quatre, pour leur premier (vrai) rendez-vous de l’année ! D’ailleurs, nous étions plus qu’au complet, puisqu’une invitée nous accompagnait. Mais, en attendant de vous raconter tout cela dans nos prochains articles, nous vous proposons une visite insolite, sur la Seine et en banlieue…

Connaissez-vous Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines ? En transilien (ligne J) on y est en 30 minutes à peine depuis Saint-Lazare. Et savez-vous que, chaque 3ème week-end de juin depuis 1960, la « Capitale de la Batellerie » démarre l’été en fanfare en célébrant son « Grand Pardon » ? Eh bien, l’année dernière, à la veille de ces festivités, nous sommes montées sur une péniche « pas comme les autres » et nous l’avons croquée.

Amarrée quai de la République, celle-ci ne transporte plus de charbon comme à l’origine : rebaptisée Je Sers et consacrée à Saint-Nicolas, elle est devenue le « bateau-chapelle » des bateliers de Conflans. Destiné à l’entraide au sein de cette communauté, le Je Sers s’est progressivement diversifié en portant assistance aux personnes en difficulté, quelle que soit leur provenance. Depuis 2014, des réfugiés tibétains y sont accueillis par La Pierre Blanche – une association que Les Croqueuses croiseront le lendemain au No Mad Festival, à Pontoise.

En ce vendredi après-midi, veille de « Pardon National », on s’active à mille préparatifs sur les quais. Nous nous engouffrons volontiers dans le ventre du bateau, à l’abri de l’agitation et des essais micro. Silencieux, chaleureux, apaisant… l’endroit est tout simplement accueillant. L’habillage en bois y est pour beaucoup, côté chapelle comme côté foyer. Vous le verrez sur les photos, de nombreux éléments relatifs à la batellerie signent l’appartenance du lieu à sa communauté, lui donnant un caractère unique. Mais on y trouve aussi tous les attributs symboliques et architecturaux d’une église – nef, chœur, abside, vitraux, statuaires et mobilier… dont une partie réalisée par Paul Croixmarie, sculpteur à l’origine d’un certain renouveau de l’Art Sacré dans les années 20.

Après une sortie au grand air sur l’île Nancy – non sans quelques pitreries… – le calme du bateau-chapelle nous fait le plus grand bien. Sur la pointe des pieds, chaque Croqueuse circule avant de choisir son angle d’attaque. Aurélie se chargera de Jésus et Anne de la Vierge Marie. Fabienne croquera le chœur et Véronique une vue d’ensemble – ses trois camarades comprises – depuis l’entrée.

Au fur et à mesure que les dessins avancent, la nef se remplit pour la messe. Bientôt le prêtre entre en scène – en Seine ? Les Croqueuses restent encore un peu, bercées par les chants religieux, avant de fermer leurs carnets pour retourner dehors, sous le soleil et les guirlandes multicolores : place à la fête et vive le « Grand Pardon » de Conflans ! 

Dessinons, découpons ! { Musée Rodin }

Dessinons, découpons ! { Musée Rodin }

Paris, février 2019 : le soleil brille et la température bat des records. Un petit air de printemps flotte dans les rues de la capitale, avec plusieurs mois d’avance – et son pic de pollution assorti, hélas ! Bien que Les Croqueuses de Paris n’aient pas planifié de sortie à quatre ce mois-ci, l’occasion est trop belle d’en improviser une en petit comité !

Voilà donc nos deux Franciliennes, Véronique et Aurélie, écourtant leur hibernation de Croqueuses pour sauter dans le métro jusqu’au Musée Rodin. Les jardins y sont splendides et l’exposition en cours les intrigue. Il y est question de dessin et de découpage – deux de leurs activités favorites, notamment dans leurs carnets. Comment les pratiquait Rodin, le sculpteur à l’œuvre si puissante, monumentale ? Allons voir cela de plus près…

Nous ne sommes pas déçues. L’exposition « Dessiner, découper » est tout simplement magnifique. Elle touche à l’intime du travail de Rodin, loin en amont de son aboutissement. Ces œuvres-là, préparatoires, n’avaient jamais été montrées – pas plus que mentionnées ou commentées, ni par aucun critique ni par l’artiste lui-même. Ces séries de silhouettes, juste évoquées d’un trait de crayon délié, rapidement aquarellées puis découpées pour être disposées ensemble (ou pas) nous donnent le sentiment de remonter le geste créateur jusqu’à la source, jusqu’à l’idée : aussi passionnant qu’émouvant. Mais, jugez vous-mêmes…

Après cette visite immergée dans la lumière douce qu’imposent les conditions de conservation du papier, nous ressortons dans le jardin. Le ciel est toujours aussi bleu, magnifiant la coupole dorée des Invalides, les corolles jaunes des jonquilles et les façades claires du musée – un écrin parfait pour les bronzes, ces corps noueux aux reflets ombrageux… C’est celui du Penseur qui, finalement, aura les faveurs de nos crayons parfois encore un peu engourdis par l’hibernation ! 😉

Merci au printemps pour cette avant-première fort prometteuse… et au Musée Rodin pour les trésors délicatement dévoilés. Depuis, les giboulées ont déboulé, les degrés ont dégringolé et Les Croqueuses sont rentrées finir l’hiver à l’abri. Rendez-vous à la prochaine éclaircie !

PS : et, en attendant, n’hésitez pas à suivre ou refaire nos visites d’expositions en story sur Instagram – rubrique Art.

{ Infos Pratiques }

Le musée se trouve au 77 rue de Varenne, dans le 7ème arrondissement – métro Varenne (ligne 13) ou Invalides (ligne 8, RER C). Il est ouvert tous les jours sauf le lundi, de 10h00 à 17h45.