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Un Minaret à Paris

Un Minaret à Paris

Prêts à partir au Maroc ? En Tunisie ? En passant par l’Andalousie ? (Tout cela, bien sûr, sans jamais quitter le 5ème arrondissement.) Alors, suivez Les Croqueuses de Paris à la Grande Mosquée

« Quand s’érigera, au-dessus des toits de la ville, le minaret que vous allez construire sur cette place, il ne montera vers le beau ciel nuancé de l’Île-de-France qu’une prière de plus dont les tours catholiques de Notre-Dame ne seront point jalouses. »

Extrait du discours officiel au lancement de la construction (1922)

VERT MENTHE

Pour commencer, nous avons rendez-vous à l’angle des rues Daubenton et Geoffroy-Saint-Hilaire. Avant de sortir crayons et carnets, nous allons d’abord nous asseoir dans la petite cour, juste à l’entrée du restaurant, autour d’un café ou d’un thé. À l’ouverture, il y a peu de monde. Chaises, tables et parasols attendent sagement les clients. La vitrine de pâtisseries, toutes plus appétissantes les unes que les autres, aussi. Deux des Croqueuses arrivent de Province : elles se sont levées aux aurores pour attraper un train et apprécient de débarquer dans ce havre de paix coloré, immédiatement dépaysant.

Véronique nous présente son amie Rosa Burdeos, l’artiste invitée du jour. Ancienne voisine – l’une à l’entrée A, l’autre à l’entrée C d’une petite cité de briques du 20ème – et marraine de sa fille cadette, elle est ici avant tout parce qu’elle dessine. Et grave, surtout. Des œuvres qu’elle expose régulièrement avec l’association Graver Maintenant. Elle enseigne également les Arts Plastiques à la Ville de Paris. Voilà ! Les présentations sont faites, les voyageuses reposées, les boissons bues et Abdelaziz, le garçon, nous offre son sourire pour un prochain lundi. Que demander de plus ? Les Croqueuses et leur invitée quittent le Salon de Thé pour aller croquer la Mosquée.

VERT OASIS

Construite quelques années après la fin de la Première Guerre mondiale dans un style hispano-mauresque, la Grande Mosquée de Paris semble prendre modèle sur celle de Fès, la prestigieuse et très ancienne Al Quaraouiyine… même si le minaret, haut de 33 mètres, évoque dit-on davantage la Zitouna de Tunis. Quant à la cour d’honneur et son jardin, absolument splendides, ils nous transportent en Andalousie. Les milliers de carreaux turquoises qui recouvrent le sol, dessinant les massifs, nous font croire au mirage d’un immense bassin d’eau claire. Bref, y pénétrer, c’est entrer dans une oasis. De fraîcheur, en été. De rêve de chaleur, en hiver. De verdure, dans la ville. De calme spirituel, dans l’agitation temporelle…

Vous lirez peut-être ici et là que la Grande Mosquée de Paris est la plus ancienne édifiée en France, mais c’est faux. D’ailleurs, si vous nous lisez attentivement, vous le savez déjà : la vraie première mosquée de Métropole fut construite ici, pendant la Première Guerre mondiale, près de l’hôpital militaire qui soignait les soldats blessés des troupes coloniales. Mais ne chipotons pas : la Grande Mosquée reste bien, en effet, la plus ancienne encore en activité. Si l’histoire de ce lieu remarquable – à la fois par sa beauté, sa vocation culturelle autant que religieuse et les enjeux politiques avec lesquels il compose depuis presque un siècle – vous intéresse, nous vous recommandons vivement cet article (Le Monde des Religions) et ce reportage (Arte), tous deux passionnants. À compléter éventuellement par la lecture du n°4315 de la revue L’Illustration, paru pendant la construction de l’édifice, en 1925.

VERT CROQUIS

Hélas, le temps passe… même dans une oasis ! Allez, Les Croqueuses, trêve de flânerie au « Jardin des Délices » : il est l’heure de choisir le meilleur point de vue, de s’y asseoir, de sortir ses affaires et de se lancer. Après avoir tout visité, les Croqueuses et leur invitée resteront dans la cour d’honneur. Les unes près de la porte monumentale donnant sur le patio, les autres sous les colonnes, le nez dans la glycine… Quel parfum délicat, quelles conditions idéales pour dessiner !

D’ailleurs, nous ne nous en lassons pas ! Véronique y est retournée la semaine dernière accompagnée d’une stagiaire débutante, qui souhaitait une journée entière d’initiation au carnet de voyage. Si dessiner sur place en bénéficiant des conseils de l’une d’entre nous vous intéresse, restez connectés : Aurélie vous a négocié quelque chose de plutôt sympathique… @ suivre 😉

{ Infos Pratiques }

La Grande Mosquée de Paris se situe au n°2 bis de la place du Puits-de-l’Ermite, Paris 5ème. Métro Place Monge. Elle est ouverte aux visiteurs (3€ l’entrée, 2 à partir de 10 personnes) tous les jours sauf le vendredi de 9h00 à 12h00 et de 14h00 à 19h00 (l’été) / 18h00 (l’hiver). Renseignements au 01 45 35 78 17.

Une chapelle sur la Seine

Une chapelle sur la Seine

Cette fois, ça y est, le (vrai) printemps est là et Les Croqueuses se sont retrouvées, toutes les quatre, pour leur premier (vrai) rendez-vous de l’année ! D’ailleurs, nous étions plus qu’au complet, puisqu’une invitée nous accompagnait. Mais, en attendant de vous raconter tout cela dans nos prochains articles, nous vous proposons une visite insolite, sur la Seine et en banlieue…

Connaissez-vous Conflans-Sainte-Honorine, dans les Yvelines ? En transilien (ligne J) on y est en 30 minutes à peine depuis Saint-Lazare. Et savez-vous que, chaque 3ème week-end de juin depuis 1960, la « Capitale de la Batellerie » démarre l’été en fanfare en célébrant son « Grand Pardon » ? Eh bien, l’année dernière, à la veille de ces festivités, nous sommes montées sur une péniche « pas comme les autres » et nous l’avons croquée.

Amarrée quai de la République, celle-ci ne transporte plus de charbon comme à l’origine : rebaptisée Je Sers et consacrée à Saint-Nicolas, elle est devenue le « bateau-chapelle » des bateliers de Conflans. Destiné à l’entraide au sein de cette communauté, le Je Sers s’est progressivement diversifié en portant assistance aux personnes en difficulté, quelle que soit leur provenance. Depuis 2014, des réfugiés tibétains y sont accueillis par La Pierre Blanche – une association que Les Croqueuses croiseront le lendemain au No Mad Festival, à Pontoise.

En ce vendredi après-midi, veille de « Pardon National », on s’active à mille préparatifs sur les quais. Nous nous engouffrons volontiers dans le ventre du bateau, à l’abri de l’agitation et des essais micro. Silencieux, chaleureux, apaisant… l’endroit est tout simplement accueillant. L’habillage en bois y est pour beaucoup, côté chapelle comme côté foyer. Vous le verrez sur les photos, de nombreux éléments relatifs à la batellerie signent l’appartenance du lieu à sa communauté, lui donnant un caractère unique. Mais on y trouve aussi tous les attributs symboliques et architecturaux d’une église – nef, chœur, abside, vitraux, statuaires et mobilier… dont une partie réalisée par Paul Croixmarie, sculpteur à l’origine d’un certain renouveau de l’Art Sacré dans les années 20.

Après une sortie au grand air sur l’île Nancy – non sans quelques pitreries… – le calme du bateau-chapelle nous fait le plus grand bien. Sur la pointe des pieds, chaque Croqueuse circule avant de choisir son angle d’attaque. Aurélie se chargera de Jésus et Anne de la Vierge Marie. Fabienne croquera le chœur et Véronique une vue d’ensemble – ses trois camarades comprises – depuis l’entrée.

Au fur et à mesure que les dessins avancent, la nef se remplit pour la messe. Bientôt le prêtre entre en scène – en Seine ? Les Croqueuses restent encore un peu, bercées par les chants religieux, avant de fermer leurs carnets pour retourner dehors, sous le soleil et les guirlandes multicolores : place à la fête et vive le « Grand Pardon » de Conflans ! 

Dessinons, découpons ! { Musée Rodin }

Dessinons, découpons ! { Musée Rodin }

Paris, février 2019 : le soleil brille et la température bat des records. Un petit air de printemps flotte dans les rues de la capitale, avec plusieurs mois d’avance – et son pic de pollution assorti, hélas ! Bien que Les Croqueuses de Paris n’aient pas planifié de sortie à quatre ce mois-ci, l’occasion est trop belle d’en improviser une en petit comité !

Voilà donc nos deux Franciliennes, Véronique et Aurélie, écourtant leur hibernation de Croqueuses pour sauter dans le métro jusqu’au Musée Rodin. Les jardins y sont splendides et l’exposition en cours les intrigue. Il y est question de dessin et de découpage – deux de leurs activités favorites, notamment dans leurs carnets. Comment les pratiquait Rodin, le sculpteur à l’œuvre si puissante, monumentale ? Allons voir cela de plus près…

Nous ne sommes pas déçues. L’exposition « Dessiner, découper » est tout simplement magnifique. Elle touche à l’intime du travail de Rodin, loin en amont de son aboutissement. Ces œuvres-là, préparatoires, n’avaient jamais été montrées – pas plus que mentionnées ou commentées, ni par aucun critique ni par l’artiste lui-même. Ces séries de silhouettes, juste évoquées d’un trait de crayon délié, rapidement aquarellées puis découpées pour être disposées ensemble (ou pas) nous donnent le sentiment de remonter le geste créateur jusqu’à la source, jusqu’à l’idée : aussi passionnant qu’émouvant. Mais, jugez vous-mêmes…

Après cette visite immergée dans la lumière douce qu’imposent les conditions de conservation du papier, nous ressortons dans le jardin. Le ciel est toujours aussi bleu, magnifiant la coupole dorée des Invalides, les corolles jaunes des jonquilles et les façades claires du musée – un écrin parfait pour les bronzes, ces corps noueux aux reflets ombrageux… C’est celui du Penseur qui, finalement, aura les faveurs de nos crayons parfois encore un peu engourdis par l’hibernation ! 😉

Merci au printemps pour cette avant-première fort prometteuse… et au Musée Rodin pour les trésors délicatement dévoilés. Depuis, les giboulées ont déboulé, les degrés ont dégringolé et Les Croqueuses sont rentrées finir l’hiver à l’abri. Rendez-vous à la prochaine éclaircie !

PS : et, en attendant, n’hésitez pas à suivre ou refaire nos visites d’expositions en story sur Instagram – rubrique Art.

{ Infos Pratiques }

Le musée se trouve au 77 rue de Varenne, dans le 7ème arrondissement – métro Varenne (ligne 13) ou Invalides (ligne 8, RER C). Il est ouvert tous les jours sauf le lundi, de 10h00 à 17h45.

Un Bouillon à Paris

Un Bouillon à Paris

L’année dernière, pour leur traditionnel repas de Noël entre copines, Les Croqueuses de Paris cherchaient l’endroit idéal. Étant données nos exigences et celles de nos porte-monnaie, le restaurant devait réunir trois qualités essentielles : typiquement parisien, chaleureux et bon marché… La veille encore, les recherches allaient bon train quand Véronique eut une illumination soudaine ! « Et si on allait chez Chartier ? »

TOUS AU BOUILLON !

Fabienne connaissait déjà, mais pas Aurélie ni Anne. Ce déjeuner serait donc l’occasion de leur faire découvrir ce haut lieu de parisianisme populaire. Car des bouillons, au début du XXème siècle, il y en avait plus de 250 dans la capitale ! Les ouvriers, les petits employés, les forts des Halles s’y nourrissaient chaque jour.

Le père de Véronique l’y emmenait, petite. C’est lui qui disait « chez Chartier » mais en réalité, ils en fréquentaient plusieurs, tous dans le même style à la fois simple et Belle Époque. Notre Croqueuse se souvient surtout de deux d’entre eux. Le premier, qui se situait à l’étage d’un immeuble rue de Richelieu, semble avoir fermé. Le second, rue du Commerce dans le 15ème arrondissement, existe encore :  il s’est modernisé – embourgeoisé aussi sans doute…

Celui-ci, le vrai Bouillon Chartier, reste authentique, avec son potage de légumes à 1€ ou ses desserts tous entre 2,60 et 4€ – dont les fameux chou et baba au rhum couverts de Chantilly qui feront craquer (et croquer) Aurélie et Fabienne !

UNE INSTITUTION

Mais d’abord, il faut s’ouvrir l’appétit : nous nous offrons une longue balade à travers le dédale des passages couverts. Le quartier en est plein et c’est toujours un grand bonheur de les parcourir en décembre, quand ils se préparent pour les fêtes et se parent de guirlandes.

Quelques minutes avant l’ouverture, Les Croqueuses rejoignent la file d’attente qui s’est déjà formée dans la cour, devant l’entrée du restaurant… Que dis-je ? De cette institution, fondée par les deux frères Chartier en 1896 ! Il y a la queue, oui. Car les 325 places assises de l’immense salle – une ancienne cour intérieure couverte par une verrière et aujourd’hui classée « Monuments Historiques » – sont fort courues aux heures de pointe !

Lorsque les portes s’ouvrent, nous faisons en sorte d’être placées au fond afin d’avoir une belle vue. Sympa, la perspective et les miroirs immenses tout autour de la salle ! C’est ainsi que Max deviendra « notre » serveur : vif, souriant, sympathique, efficace… celui-ci nous mettra tellement à l’aise que nous resterons assises à cette même table cinq heures durant – oui oui, vous avez bien lu ! Le temps de tout bien croquer, tranquilles, à tous les sens du terme.

DES CONVERSATIONS

Et puis, comme souvent à Paris – si si, détrompez-vous ! – dans ce genre d’endroit convivial, la conversation s’engage entre voisins de table..

La dame placée à la gauche de Véronique, s’apercevant qu’elle figure en gros plan sur son dessin, lui confie son prénom et la raison de sa présence ici aujourd’hui : Sophie est venue, avec son mari, parce que c’est son anniversaire et qu’elle adore ce restaurant. C’est un déjeuner de fête, mais en toute discrétion, sans bougie ni gâteau, juste comme ça – un petit rituel de « vieux » Parisiens.

De l’autre côté de l’allée, on célèbre autre chose. Le costume d’un des clients nous intrigue beaucoup, avec son gilet noir, ses bas blancs, son jabot et ses manches en dentelles. Serait-ce un comédien ? Travaille-t-il au Musée Grévin, situé juste à côté ? Eh bien, pas du tout : il s’agit d’un Notaire qui vient de prêter serment !

L’après-midi a passé vite, dans cette atmosphère si particulière… un pur bonheur. Max aura bientôt fini son service et la relève est arrivée : sa collègue (et amie) Virginie vient d’enfiler son grand tablier. L’addition griffonnée sur la nappe, nous leur offrons en guise de pourboire nos petits cadeaux de Noël (cartes postales et badges) et promettons de revenir. Leurs deux beaux sourires nous font très plaisirs. Depuis, Aurélie a tenu promesse – pas moins de quatre fois ! – y amenant moult copines et famille de passage, tous conquis par l’ambiance, le ballet des serveurs, le décor et le rapport qualité-prix.

Alors… et vous qui nous lisez, irez-vous à votre tour ? Si oui, soyez choux, saluez Max ou Virginie pour nous !

{ Infos Pratiques }

Le Bouillon Chartier est au n°7 de la rue du Faubourg Montmartre, Paris 9ème. Métro Grands Boulevards. Il est ou­vert tous les jours de 11h30 à minuit. (Pas de réservation.)

Paris est un Jardin tropical

Paris est un Jardin tropical

Sans doute connaissez-vous le Bois de Vincennes – l’autre poumon vert de Paris, le pendant du Bois de Boulogne côté Est de la capitale. On y va pour le Zoo, le Parc Floral ou encore l’Hippodrome… mais savez-vous qu’on peut aussi s’y perdre dans une petite « jungle » où d’anciens pavillons exotiques semblent s’être peu à peu figés sous la mousse ? Venez, nous allons visiter le Jardin d’Agronomie Tropicale de Paris.

DUR PASSÉ

Lieu de promenade ouvert à tous à la pointe la plus orientale du Bois, l’endroit porte la marque d’une histoire plutôt lourde – un passé en forme de passif… Créé à la fin du XIXe siècle pour étudier les plantes cultivables Outre-mer, le jardin fut en effet choisi en 1907 pour accueillir la première Exposition coloniale organisée à Paris.

On le divise alors en deux parties principales, africaine et asiatique, de part et d’autre de l’allée centrale. Des pavillons sont construits qui demeurent aujourd’hui, parfois en très mauvais état ; d’autres ont été détruits. Des villages traditionnels congolais, indochinois, malgache et kanak y sont reconstitués, ainsi qu’une ferme soudanaise et un campement touareg. Des « autochtones » y tiennent leur propre rôle pour le public français en quête d’exotisme. On n’est pas loin du « zoo humain »… Et c’est un gros succès : de mai à octobre, deux millions de visiteurs viendront voir à quoi ressemble la vie « aux colonies ». D’ailleurs, l’idée n’est pas seulement d’en montrer un aperçu, mais bien de faire envie. Car à l’époque, on manque de cadres administratifs et l’État espère, par cette opération, recruter des volontaires pour partir s’installer là-bas.

Quelques éléments sont antérieurs à 1907. Ainsi les serres des deux marques de chocolat et de café Menier et Hamel furent-elles remontées au Jardin d’agronomie tropicale à l’issue de l’Exposition universelle de 1900. Tout comme le fut la porte chinoise en bois rouge après l’Exposition universelle de 1906, où elle était exposée sous la verrière du Grand Palais. D’autres monuments, notamment mémoriels, sont au contraire plus récents – par exemple, le stûpa dédié aux soldats cambodgiens et laotiens morts pour la France. Car le lieu porte aussi l’empreinte de la Première guerre mondiale, durant laquelle fut installé l’hôpital des troupes coloniales et construite la toute première mosquée de France métropolitaine… Si le sujet vous intéresse, nous vous conseillons ce superbe documentaire signé Françoise Poulin Jacob.

VERT L’AVENIR

Mais ce lieu de mémoire, hanté par la guerre et la colonisation, porte aussi le beau nom de René Dumont, premier penseur français de l’écologie politique. Et on y travaille à l’avenir, avec les CIRED (Centre International de Recherche sur l’Environnement et le Développement) et CIRAD (Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement)…

Mais le présent est bien là, lui aussi. Grâce, notamment, à l‘association V’île Fertile. Ses ambitions sont plus locales : micro-ferme maraîchère associative, elle produit des légumes frais, sains et décarbonés, en tirant partie des ressources organiques de la ville pour les vendre au détail, sur place.

Vous le savez, Les Croqueuses vivent au présent elles aussi, bien décidées à profiter de ces instants d’amitié partagée – crayons, pinceaux et carnets à la main. Alors, ce matin-là, nous avons traversé le Bois de Vincennes ensemble, croisé les oies bernaches et la police montée, poussé la petite porte verte du Jardin d’Agronomie Tropicale et nous sommes laissées avaler par cette fausse « jungle » pleine de fantômes et de jolies surprises…

CARPE DIEM

Qui penserait voir, ici, à Paris, des couples de perroquets verts s’envoler de branches en branches ? Alors que nous traversons le jardin en quête d’un endroit propice au dessin, notre Croqueuse Véronique soudain s’arrête et nous montrent les feuillages, surexcitée. « Promis, je vous jure, c’était des perroquets verts ! Je les ai reconnus, j’en ai vus l’année dernière au Sri Lanka ! » Hum. Les trois autres Croqueuses, il faut l’avouer, restent songeuses. Voire perplexes. Il fait très chaud – et lourd, et moite – ce jour-là. Elles n’osent pas proposer à Véronique de se tenir à l’ombre et de boire un peu d’eau fraîche… quand tout-à-coup, un bruissement dans les arbres attire l’attention d’Aurélie. « Je les ai vus aussi ! C’est dingue ! Ils sont magnifiques ! » Ouf, Véronique se sent moins seule.

Quelques pas plus loin, l’endroit propice est trouvé. L’esplanade du Dinh vietnamien nous accueille avec son joli mur de briques et son urne funéraire en bronze, semblable paraît-il à celles du Palais Impérial de Hué. En face, une pagode rouge, qui tranche avec le vert vif des bambous. Et au milieu, un escalier flanqué de deux gros dragons pas commodes. Voilà, on y est. L’inspiration est là. On s’assoit et on croque, dans une quiétude tropicale intense, jusqu’à totale inanition… sans oublier de faire, évidemment, quelques pitreries pour la galerie !

{ Infos Pratiques }

Le Jardin d’Agronomie Tropicale est au n°45 bis de l’avenue de la Belle-Gabrielle, Paris 12ème. RER Nogent sur Marne (ligne A – direction Boissy-Saint-Léger / La Varenne) puis 10 minutes à pied. Il est ou­vert tous les jours à partir de 9h30 ; l’heure de fermeture dépend des saisons…

Exposition Chefs-d’œuvre ! { Musée Picasso }

Exposition Chefs-d’œuvre ! { Musée Picasso }

Courant novembre, Les Croqueuses de Paris étaient invitées par le Musée Picasso à l’exposition Chefs-d’œuvre ! Comme pour Guernica, Aurélie et Véronique ont aussitôt répondu présent : la première lors d’une soirée privée avec la commissaire, la seconde en allant y « croquer » au milieu du public.

Qu’est-ce qu’un chef-d’œuvre ? Comment le reconnaît-on ? Est-ce une révélation unique et immédiate ou cela se construit-il en plusieurs étapes, au fil du temps ? C’est cette énigme passionnante – posée comme en prolongement de l’exposition précédente sur le « cas Guernica » – que ce tout nouvel accrochage nous invite à (tenter de) résoudre.

Évidemment, pour Picasso, la question se pose d’autant plus que son œuvre est prolifique – certains n’ont pas manqué de le lui reprocher, d’ailleurs ! – et qu’il a pratiqué de très nombreuses techniques : peinture et dessin bien sûr, mais aussi gravure et sculpture.  (Et quelle grâce, quelle émotion, ses petits papiers déchirés, si fragiles et légers…) La quête d’une réponse est donc pour le visiteur l’occasion de revoir ou de découvrir différents aspects de cette œuvre exceptionnelle, multiple et généreuse, témoignant d’une vie entière de recherche consacrée à la création – peut-être son ultime chef-d’œuvre ?

Au cours de sa visite, Aurélie croquera des visages – notamment celui de Dora Maar, d’après le portrait qu’elle adore – tandis qu’Esmeralda posera sagement devant Véronique… Cette dernière ira ensuite, à l’étage, admirer la superbe collection personnelle de Picasso : des choix qui éclairent bien évidemment son œuvre !

Véronique testera aussi la terrasse du café, très agréable sous ce doux soleil de novembre. Puis, en sortant, elle poussera la porte de la boutique du musée, située sur le trottoir d’en face, et sera très heureuse (et fière !) d’y trouver son album Les Trois Musiciens en deux versions, française et anglaise – classe, non ? 😉

Encore un grand merci au Musée Picasso pour sa fidélité : d’exposition en exposition, Les Croqueuses redécouvrent sans cesse le travail de ce grand artiste sous de nouveaux jours, passionnants… Chers lecteurs, n’hésitez pas à faire de même !

Un Musée à Montmartre

Un Musée à Montmartre

De toutes Les Croqueuses, seule Anne – la plus provinciale d’entre nous, n’ayant jamais habité à Paris – était déjà venue au Musée de Montmartre. L’erreur fut réparée en septembre, avec bonheur. Renoir, Bernard, Dufy, Camoin, Valadon, Utrillo… tous ont séjourné ou vécu ici. Et y ont travaillé. En matière de beaux lieux, les artistes se trompent rarement !

LES JARDINS

Oui, on peut employer le pluriel, car l’espace extérieur du musée se partage en plusieurs lieux distincts. Depuis la rue Cortot, on ne devine pas que tout ce vert est caché derrière la façade. Ces jardins sont reliés entre eux par différents passages – longue allée couverte de roses et de coings, portes ouvertes dans de vieux murs ou volées d’escaliers plongeant dans la verdure. Le plus vaste accueille, autour des nénuphars, les tables du Café Renoir. C’est là, dans ce jardin, qu’a été peint La balançoire. Plus bas, la vue embrasse généreusement le quartier, les vignes du Clos Montmartre et le Lapin Agile. On aperçoit le cimetière Saint-Vincent – où sont enterrés les peintres Utrillo et Boudin, les affichistes Steinlen et Chéret, les écrivains Roland Dorgelès et Marcel Aymé, ainsi que Marcel Carné.

Il fait si bon dehors, deux des Croqueuses s’y installent pour dessiner. Anne croque la façade arrière du musée ; Fabienne, l’atelier de Suzanne vu depuis la terrasse du café. Véronique poursuit la visite…

LE MUSÉE

C’est la Société d’Histoire et d’Archéologie Le Vieux Montmartre, créée en 1886, qui peu à peu a constitué un fonds d’œuvres très important – peintures, sculptures, affiches, dessins, lithographies, photographies… L’ensemble raconte, de manière assez vivante, l’histoire de ce quartier emblématique. Populaire, créatif, révolté. En un mot, bouillonnant !

L’évocation des danseuses de cancan et celle du café, avec son superbe zinc, sont particulièrement réussies. Celle du cabaret Le Chat Noir aussi. On y découvre une pure merveille : douze décors du fameux théâtre d’ombres d’Henri Rivière – dont Véronique est une grande admiratrice. Créé en 1960, le musée fut repensé en 2011 sous la houlette de la société Kleber-Rossillon, globalement plus spécialisée dans les parcs et les châteaux médiévaux. Le résultat est vraiment séduisant, sans tape-à-l’œil attrape-touristes. Pardon, mais… à Montmartre, tout Parisien se méfie !

CHEZ SUZANNE ET MAURICE

La reconstitution de l’atelier-appartement que Suzanne Valadon partageait avec son fils, Maurice Utrillo, est à ce titre exemplaire. Confiée à Hubert Le Gall, elle nous emmène doucement dans une autre époque. Dans une intimité simplement évoquée. Dès l’entrée, les Croqueuses avançaient sur la pointe des pieds comme si Suzanne, remontant soudain l’escalier, allait nous surprendre chez elle. Après avoir (un peu) hésité avec le beau zinc du musée, Véronique choisira de dessiner l’atelier. Pour l’espace, pour la lumière… et surtout l’émotion.

Y serez-vous sensibles, vous aussi ? Venez, si vous le pouvez, un matin de semaine et prenez le temps d’y flâner. Le portable éteint au fond du sac, laissez-vous séduire par l’atmosphère, si particulière, du Montmartre de 1900. Petit conseil de Croqueuses : en Métro, prenez la ligne 12 et descendez à Lamarck-Caulaincourt. Vous éviterez le plus gros des troupes de touristes et profiterez de jolies rues, moins fréquentées qu’autour de la place du Tertre. (De rien !)

{ Infos Pratiques }

Le Musée de Montmartre est au n°12 de la rue Cortot, Paris 18ème. Métro Lamarck-Caulaincourt ou Anvers (puis funiculaire de Montmartre). Il est ou­vert tous les jours de 10h à 19h d’avril à septembre et de 10h à 18h d’octobre à mars.

Le Café Renoir, lui, vous accueille du mercredi au dimanche de 12h15 à 17h d’octobre à avril. Mais à partir du 1er mai, il est ouvert tous les jours de 12h15 à 18h.

RADIO-CROQUEUSES !